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RFC 7764 Guidance on Markdown

Citations provenant de RFC 7764: Guidance on Markdown: Design Philosophies, Stability Strategies, and Select Registrations

Texte brut, formats binaires et markdown

Lorsqu’on veut stocker des textes (romans, rapports techniques, articles scientifiques, lettres d’amour, etc) sur un système informatique, on a plusieurs solutions : elles vont du texte brut à un format binaire. Le texte brut est le stockage des seuls caractères Unicode (cf. RFC 6838, section 4.2.1 : le texte est distribué sur l’Internet avec un type MIMEtext/quelquechose, par exemple text/plain pour le texte brut). Son gros avantage est qu’il est lisible et modifiable avec n’importe quel logiciel. Bon, en fait, le texte brut n’est jamais tout à fait brut. Il contient quelques caractères de contrôle comme le saut de ligne ou la marque d’un nouveau paragraphe(U+2029 en Unicode, mais ce séparateur de paragraphe n’est que rarement géré par les logiciels).
À l’autre extrémité se trouve les formats binaires : lisibles et modifiables uniquement par des applications spécifiques (et c’est pour cela qu’ils sont distribués avec le type MIME application/quelquechose).
Entre les deux se trouvent le texte formaté ou marqué. Il s’agit à première vue de texte brut mais il inclut en fait quelques marques qui ont une signification non prévue par le jeu de caractères. Un exemple classique est la mise en évidence qui, en Markdown, se fait en encadrant le texte avec des étoiles : « il est très important de comprendre que… »

Type MIME

Depuis le RFC 7763, il existe un type MIME 1 pour identifier Markdown,text/markdown. (Une extension de nom de fichier comme .md ne suffit pas : tout le contenu n’est pas forcément dans des fichiers.)

La suite porte sur le problème de préservation du type MIME ("Markdown n’a pas l’équivalent du <?xml version="1.0"> qui, au début des contenus en XML, indique sans ambiguité qu’il s’agit de XML") ainsi que sur le stockage des métadonnées.

Lire RFC 7764

1 : Un type de médias (media type en anglais), à l’origine (et toujours communément) appelé type MIME, est un identifiant de format de données sur internet en deux parties.

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Markdown et automatisation

Il est possible d’automatiser certaines actions pour gagner du temps.

Shortcuts

Sur iPad OS ou iOS, on peut utiliser Shortcuts pour rapidement transformer du texte. En voici quelques exemples :

Selon les applications que vous utilisez, vous pouvez automatiser la création de votre site. Ainsi, ce shortcut

  1. Exporte le texte en HTML écrit en Markdown
  2. Insère tout le code nécessaire à la création d’une page sur Ralentir travaux (différentes balises et scripts)
  3. Nomme le fichier créé en puisant dans la balise <h1> tout en supprimant tout signe diacritique.
  4. Uploade le fichier sur mon serveur.

Automator

Avec les Markdown Service Tools, vous pouvez choisir certains scripts pour réaliser rapidement différentes manipulations très vite. Ainsi, imaginons que vous souhaitiez sélectionner pour vos élèves une dizaine de sites web dans Safari et constituer une liste contenant le nom du site et le lien afférent. En lançant le script md – Links – Safari Tabs dans TextEdit, vous obtiendrez automatiquement cette liste en un seul clic.

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Pourquoi écrire en Markdown

Une réponse pas si évidente

Il faut bien poser la question puisque la réponse que l’on peut y apporter peut détourner certains de recourir à une telle pratique. Après tout, il est évident que certainement peu de monde a envie d’abandonner son traitement de texte favori. J’imagine que Word a de nombreux fervents. Les utilisateurs de Mac ou d’iPad trouveront dans Pages un joli traitement de texte permettant même de faire des livres numériques. Les fans de Google verront dans Google Docs l’app collaborative par excellence que l’on peut enrichir de merveilleuses extensions.

Alors pourquoi ?

Encore une fois la réponse n’est pas évidente, car je peux imaginer que de nombreux personnes considèrent qu’un logiciel WYSIWYG (What You See Is What You Get) est aujourd’hui la norme et est indispensable. C’est tellement pratique ! On écrit et ce qu’on obtient est absolument similaire à ce qu’on a écrit, et cela séduit immédiatement l’œil quand un traitement de texte recourant au Markdown nécessite un format de sortie. C’est une sorte de code (un format d’entrée) qui nécessitera un format de sortie (de publication si vous préférez). En effet, si vous écrivez en Markdown, ce que vous voyez n’est pas ce que vous aurez : vous écrivez, et votre travail sera ensuite exporté dans l’un des formats de votre choix : rtf, txt, md, docx, PDF, HTML, ePub…

Le texte écrit en Markdown (Pretext) & lu sur GitHub

Une première réponse

Vous vous direz que vous avez là un premier élément de réponse : la grande variété de formats possibles. Mais, pour moi, les premiers éléments de la liste sont les plus importants. En effet, je fuis désormais comme la peste les applications vous enfermant dans un format propriétaire dont la durée de vie peut atteindre un terme prématuré quand une entreprise décide que le logiciel sur lequel vous aviez fondé tous vos espoirs n’est pas financièrement profitable. Par ailleurs, si vous décidez de migrer et qu’un jour vous en avez assez du Mac ou de votre PC, vous envisagerez la portabilité de vos données avec réconfort sinon avec joie. C’est pour cette raison que lorsque je vois des enseignants bâtir leurs séquences entières pour telle ou telle plateforme, je me dis que cela n’est pas prudent. Par exemple si vous créez pendant trois ans des cours pour le TBI Promethean et que vous réalisez (en général bien tardivement) que l’établissement pour lequel vous avez obtenu votre mutation utilise SmartTech, vous allez avoir pas mal de travail de sauvegarde et d’adaptation. Je suis passé par là et la faute incombe aux nombreux logiciels auxquels j’ai confié mes cours : Works, Word, LibreOffice, Pages, Google Docs, etc.

Pour moi, la solution la plus simple est donc alors d’écrire d’abord mes cours sur un traitement de texte comme iA Writer puis d’exporter mon cours dans le format de mon choix (choix fait en fonction de l’établissement dans lequel je me trouve). En l’occurrence, comme nous utilisons massivement la G-Suite, mes cours arrivent sur Google Docs ou au format PDF dans Classroom. Mais je ne veux absolument pas me poser la question du transfert de mes données si un jour (improbable) on abandonne la G-Suite ou si je quitte l’établissement.

Or le format txt ou md autorise cette portabilité des données. Par ailleurs le format texte brut (plain text en anglais) est pérenne. Aucune inquiétude. Il ne dépend pas du bon vouloir d’Apple ou de Microsoft. Le format texte brut est indestructible. Ajoutons enfin qu’une application comme Pandoc fait du Markdown un format particulièrement « versatile » et exportable en à peu près tout ce que vous souhaitez (voir, à ce propos, la page Liens).

Enfin, ça n’a pas été pour moi le moindre étonnement de découvrir que je pouvais « présenter », avec HackMD, mon texte comme je le ferai avec Keynote ou PowerPoint. Au prix de quelques petites adaptations, des portions de texte se transforment en diapositives (« slides » en anglais) Voici deux exemples :

Un diaporama réalisé avec HackMD

Les mains sur le clavier

Il y a un autre point qui me plait beaucoup dans le Markdown, c’est la possibilité de se concentrer sur l’écriture, les deux mains sur le clavier. J’ai toujours détesté lâcher le clavier, parcourir l’écran pour chercher un menu, puis parfois un sous-menu afin de trouver le réglage nécessaire au formatage du texte. Avec le Markdown, tout est fait au clavier en insérant des balises ou des signes simples : mettre en gras se fait au clavier, créer un lien se fait au clavier, une liste à puces se fait au clavier, etc.

C’est pourquoi j’adore les raccourcis clavier en particulier ceux qui me permettent de me « balader » n’importe où sur la page sans avoir à « caresser » mon trackpad sur des kilomètres.

  • Aller du début à la fin de la ligne (et vice versa) : ⌘ + ➝
  • Aller au début ou à la fin d’un mot : ⌥ + ➝
  • Sélectionner lettre par lettre : ⇧ + ➝
  • Sélectionner mot par mot : ⇧ + ⌥ + ➝
  • Sélectionner toute la ligne : ⌘ + ⇧ + ➝ ou sélectionner à partir du curseur du début du texte : ⌘ + ⇧ + ↑ ou vers la fin : ⌘ + ⇧ + ↓

La possibilité d’automatiser

Les traitements de texte reposant sur le Markdown ont une grande flexibilité en ce qui concerne l’automatisation. Si vous êtes arrivé sur cette page, vous avez probablement vu ou lu les articles suivants :

Ce script me permet d’écrire avec iA Writer, d’exporter au HTML et de contenir toutes les portions de code nécessaire à l’affichage d’une page sur Ralentir travaux

Dans le dernier article, j’évoque Shorcuts sur iOS et iPad OS, mais aussi Automator sur Mac et notamment cette série de scripts :

Avec les Markdown Service Tools, vous pouvez choisir certains scripts pour réaliser rapidement différentes manipulations très vite. Ainsi, imaginons que vous souhaitiez sélectionner pour vos élèves une dizaine de sites web dans Safari et constituer une liste contenant le nom du site et le lien afférent. En lançant le script md – Links – Safari Tabs dans TextEdit, vous obtiendrez automatiquement cette liste en un seul clic.

Mais si l’écriture de script n’est pas votre truc (et pour être honnête, ça n’est pas tout à fait le mien), il existe de nombreux services tout prêts à l’emploi précisément comme les susmentionnés Markdown Service Tools, mais aussi des sites qui vous proposent de convertir votre texte en Mardown. Ainsi, je l’ai mentionné plus haut, avec Pandoc, vous pouvez convertir votre article écrit en Markdown en HTLM 5 pour votre blog ou en Wikicode si vous prévoyez de la partager sur un wiki.

Créez vos propres templates

Généralement, quand vous utilisez un traitement de texte, vous disposez de « templates » c’est-à-dire de modèles proposés par l’éditeur du logiciel. Mais vous pouvez créer les vôtres. Avec certains éditeurs de texte, vous pouvez éditer la feuille de style (CSS) et bâtir votre propre modèle. C’est une fonction que j’utilise assez peu, car sur iPad les applications le permettant sont assez rares (il y a toutefois Editorial). Sur Mac, il y a Ulysses ou Marked qui proposent d’ailleurs tous deux des galeries de modèles à télécharger. Mais pensez bien qu’en éditant le CSS, vous pouvez composer votre modèle dans les moindres détails ou même conformer vos textes au graphisme de votre site, ce qui est plutôt pratique. Vous pouvez alors avoir un mode sombre ou avoir un affichage qui s’adapte à la taille de l’écran, toute la palette des couleurs qu’offre le code hexadécimal, bref, tout ce qu’on fait avec le CSS.

La feuille de style dans Editorial sur iPad

Pour résumer, je trouve que je travaille plus vite depuis que j’utilise le Markdown. Traitement de texte léger, format portable, mains solidement posées sur le clavier, automatisation des tâches, possibilité de créer ses propres templates… C’est un bonheur d’écrivain (ou d’écrivant en ce qui me concerne).

Le web sémantique

Il existe une autre raison qui n’est pas spécifiquement inhérente au Markdown, mais qui lui est quand même fortement consubstantielle.

Le Markdown ayant été conçu comme un format de texte pour construire des documents structurés ensuite convertis en HTML, il est, je crois, impossible, d’écrire un texte en Markdown sans que celui n’ait une forte structure qui tient, entre autres, à l’utilisation des titres qui sont hiérarchisés.

Je vous explique. De nombreuses personnes écrivent un document, placent un titre, le mettent en gras et grossissent la police. On pourrait en fait dire que ceci n’est pas un titre. C’est du texte (le corps) qui fait office de titre, mais ce n’est pas un titre. Pas un vrai en tout cas. Même chose avec les sous-titres : un peu de gras, on saute une ligne, etc. Ça ressemble à un sous-titre, mais ça n’en est pas un. Pour que ça en soit, il faudrait aller faire un tour dans les styles et appliquer le style idoine (et c’est bien pratique. C’est même ça qui vous créent de facto une table des matières).

Que ce soit en Markdown ou en HTML, les titres et les sous-titres présentent des différences. Le titre principal est précédé d’un # (en Markdown) ou encadré par les balises <h1></h1>. Un titre de niveau 2 aura ## en Markdown ou <h2></h2> en HTML, etc. Ça va jusqu’à 6.

Quelle différence ?

Énorme. Un document structuré ainsi est dit sémantique. Il signifie quelque chose — et pas seulement pour le créateur du document —, non, il signifie quelque chose pour le moteur de recherche de Google qui saura indexer correctement votre travail en identifiant le titre principal et ce qui est secondaire ou ce qui se trouve être un paragraphe. Imaginez bien que les machines de Google n’ont aucune idée que l’infâme truc qui trône en haut du document en police 76 de couleur fuchsia est un titre. Seule un document structuré sera en mesure d’être signifiant pour un robot.

Si vous n’êtes pas convaincu, sachez que tout le monde ne « lit » pas le web. Certains l’écoutent et ceux qui ne peuvent alors bénéficier d’un périphérique d’affichage mais recourent à des systèmes auditifs vous seront reconnaissants. La reconnaissance vocale est d’ailleurs ainsi bien meilleure.

En tout cas, tout le monde sera satisfait. Les personnes mal voyantes comme le chercheur qui glanent des informations sur le web.

Vers un travail collaboratif

Si c’était tout, ce serait déjà pas mal, mais ce serait probablement peu convaincant ou en tout cas pas suffisant pour vous faire adopter le Markdown. Alors, disons-le d’emblée, ce qui me séduit aujourd’hui dans le choix du Markdown est la possibilité de synchroniser mes cours sur GitHub et de rendre mon travail collaboratif.

Pour être tout à fait honnête, la lecture de l’article de MacStories, My Markdown Writing and Collaboration Workflow, Powered by Working Copy 3.6, iCloud Drive, and GitHub, a été pour moi une véritable révélation. J’imagine que j’aurais pu découvrir tout cela plus tôt notamment à travers cet autre article du même auteur. Mais il m’a fallu aussi un peu de temps pour assimiler tout cela.

Reprenons depuis le début.

La mort de mon disque dur

Je pense que tout a commencé avec la mort de mon disque dur externe ou disons du dernier disque dur que j’ai acheté. Il semble que ces choses-là sont fragiles et j’ai décidé, il y a bien dix ans maintenant au moins, de n’en plus acheter. Jamais. Au lieu de ça, j’ai uploadé (désolé, téléverser ne me plait pas) l’ensemble de mes données sur le web. Au début, j’utilisais iDrive puis j’ai utilisé Hubic puis iCloud. On ne peut pas dire que ce dernier choix m’ait systématiquement paru satisfaisant tant le cloud d’Apple a pu parfois connaître quelques ratés particulièrement agaçants, mais les choses se sont (un peu) améliorées.

Bref, depuis, mes données sont en ligne. Je peux quasiment effacer le contenu de mon iPad sans aucun remord. Tout est sauvegardé sans que j’aie à y penser, et je retrouve mes fichiers instantanément si je change de machine.

Partager, oui. Mais comment ?

Ah ! Mais si tout est en ligne, alors pourquoi ne pas le partager ? Pourquoi ne pas donner le lien du dossier où se nichent mes milliers de fichiers (privilège de vieux) ? Que faire alors ? Donner les droits en écriture ? Cela est risqué. Accorder seulement la lecture seule ? Cela limite la potentielle collaboration. Pendant la pandémie, j’ai pensé partager tous mes cours sur un dossier accessible sur Ralentir travaux. Mais ce n’était pas pratique. Chaque fois que je faisais une modification sur mon traitement de texte, il fallait que j’uploade la nouvelle version en écrasant l’ancienne à l’aide d’un FTP. Fastidieux.

C’est à ce moment que l’article de Federico Viticci m’est revenu en mémoire. Pourquoi ne pas partager mes cours de la façon suivante :

  1. Créer un dossier contenant mes cours dans l’application iA Writer.
  2. Ouvrir ce même dossier dans Working Copy (un client GitHub pour iPad).
  3. Synchroniser ce dossier (un « repository » dans le langage GitHub) sur GitHub (un « remote »).

La plus-value est assez évidente pour qui connait ces applications (j’avoue avoir été assez économe d’explications. Pardonnez-moi. Je vous renvoie aux articles de MacStories qui expliquent tout cela en long et en large).

  1. Quoi que j’écrive sur mon traitement de texte favori, les modifications sont automatiquement effectives dans Working Copy. C’est normal puisque les deux apps intègrent le Markdown et exploitent le même dossier. Je n’ai plus ensuite, dans Working Copy, qu’à synchroniser avec GitHub (« commit »).
  2. Mes cours sont en ligne. Ils sont sauvegardés. C’est une chose, mais de surcroît, ils peuvent être partagés avec d’autres enseignants. Ceux-ci peuvent proposer des modifications ou suggérer des changements que je suis libre d’accepter ou pas. Et c’est là qu’est l’intérêt de GitHub qui est un service web plutôt orienté développement mais qui est basé un système de contrôle de version. Si bien que si quelqu’un propose une modification, ajoute un paragraphe, enlève un mot, complète avec une phrase, je vais pouvoir très facilement et très agréablement dans une jolie interface comparer les différentes versions du texte et choisir de conserver ou de supprimer tel ou tel ajout.

Les deux versions d’un même texte dans Working Copy

Au terme de cet article, on peut donc dire que le Markdown est un format simple, pratique, structuré, pérenne, sémantique, flexible et favorisant la collaboration. Que peut-on demander de plus ?

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Liens

Pour mieux comprendre le Markdown

StackEdit

Pour écrire en Markdown

En ligne

iOS/iPad OS

Mac

Multiplateformes

Réaliser une présentation en Markdown

De la même façon que vous utiliseriez Keynote ou PowerPoint pour réaliser une présentation, vous pouvez utiliser l’une des ressources ci-dessous pour réaliser votre présentation en Markdown.

Créer une carte mentale

Pour mieux comprendre comment utiliser HackMD

Pourquoi utiliser le Markdown

Avec Pandoc, convertissez vos fichiers .md

Ressources utiles

À propos de Pandoc

Avec Pandoc, vous pouvez convertir un fichier avec l’extension .md en fichier .odt. Pour cela, téléchargez Pandoc. Lancez le Terminal. Imaginons que votre fichier se trouve sur le bureau et s’intitule fichier.md, tapez cd ~/desktop puis pandoc fichier.md -o fichier.odt. Et voilà !

Travaillant le plus souvent sur mon iPad, j’apprécie dans la version en ligne de pouvoir exporter un texte écrit en Markdown pour le copier dans un wiki sans avoir à faire autre chose qu’appuyer sur conversion. Mais si vous avez votre Mac sous la main ou n’importe quelle app (comme Screens) vous permettant d’accéder à votre Mac depuis votre iPad, vous pouvez taper la commande pandoc fichier.md -o fichier.wiki et voilà !

Si vous avez besoin d’aide à propos de Pandoc, vous pouvez consulter la documentation. Il y a également un groupe de discussion sur Google Groups.

Si vous avez un Mac et que vous n’aimez pas les lignes de commande, il semble que l’app MultiMarkdown Converter fasse l’affaire pour une somme relativement modique. Elle repose sur MMD (qui s’utilise justement en ligne de commande)… Mais qui est gratuit…

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Le guide du Markdown

Faire un paragraphe

Pour aller à la ligne, appuyez simplement sur la touche . Si vous souhaitez forcer le retour à la ligne, insérez la balise <br />.

Les titres

Comme en HTML, il y a des titres de plusieurs niveaux (1 à 6). On utilise le signe # pour ce faire.

# Titre de niveau 1
## Titre de niveau 2
### Titre de niveau 3
#### Titre de niveau 4
##### Titre de niveau 5
###### Titre de niveau 6

Mettre en gras, en italique, surligner ou rayer un mot

  • Pour mettre un mot en italique, placez ce mot entre astérisques * : Ce mot est en *italique*.
  • Pour mettre un mot en gras, placez-le entre deux astérisques **Ce mot est en **gras**.
  • Pour surligner un mot, placez deux signes égal de part et d’autre : Ce mot est ==surligné==.
  • Pour barrer un mot, encadrez-le d’un double tilde ~~ : Ce mot est ~~barré~~.

Insérer une note de bas de page

Placez [^1] juste après le mot à la suite duquel vous souhaitez insérez une note de bas de page.

Tout en bas de votre document, insérer alors ceci :

[^1]: Ma note de bas de page.

Faire une liste

Liste ordonnée

Pour faire une liste ordonnée, simplement numéroter les lignes suivies à chaque fois d’un point :

1. Élément 1
2. Élément 2
3. Élément 3

Liste non-ordonnée

Pour faire une liste non-ordonnée (c’est-à-dire une liste à puces), vous pouvez utiliser au choix le tiret (-), l’astérisque (*) ou le signe +.

- Élément 1
- Élément 2
- Élément 3

Mettre un lien

Si vous voulez faire un lien vers un site externe, simplement mettre le ou les mots entre crochets suivis du lien mis entre parenthèses, ce qui donne ceci :

[Ralentir travaux](https://www.ralentirtravaux.com)

Vous pouvez inclure une description du lien dans les parenthèses.

[Ralentir travaux](https://www.ralentirtravaux.com "Ralentir travaux, le site du français")

Si vous voulez insérer une adresse email, écrivez votre adresse entourée des chevrons <>: <monadresse@truc.com> .

Insérer une image

Procédez de la même façon que pour insérer un lien, mais en ajoutant un point d’exclamation avant les crochets. L’URL que vous placerez entre parenthèses sera celle de votre image.

![Trois manuels](https://www.ralentirtravaux.com/images/site/trois-manuels.png "Trois manuels")

Insérer un saut de page

Placez trois signes +++.

Insérer une ligne horizontale

Pour créer une ligne horizontale, insérez trois astérisques (***), tiret (---) ou « underscores » (___) à la suite.

Citer du texte

Faite précéder le texte d’un simple chevron > pour faire une citation

> Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
> Tu réclamais le Soir; il descend; le voici

Faire un tableau

Chaque colonne est séparée d’un pipe (|). Pour faire un rang supplémentaire, allez à la ligne et recommencez.

Voici un exemple :

|1re colonne|2e colonne|3e colonne|
|:—|:—:|-:|
|Alignement à gauche|Alignement centré|Alignement à droite|
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Apprendre le Markdown

Le markdown s’apprend en cinq minutes. C’est vraiment très simple.

Son intérêt est triple :

  1. Vous écrivez sur un traitement de texte dont le format est txt ou md. Autant dire que ce type de fichier sera encore lisible dans 50 ans, quelle que soit l’évolution de l’application que vous utilisez.
  2. Vous formatez votre texte sans quitter votre clavier et sans avoir à plonger dans un sous-menu pour obtenir l’effet désiré (ou lorsque les commandes de mise en forme ne sont pas disponibles, comme dans des champs de commentaires de certains sites).
  3. L’export est généralement assez riche : txt, PDF, Docs, HTML, ePub, etc.

Introduction

Markdown est un langage de balisage léger créé en 2004 par John Gruber avec l’aide d’Aaron Swartz. Son but est d’offrir une syntaxe facile à lire et à écrire. Un document balisé par Markdown peut être lu en l’état sans donner l’impression d’avoir été balisé ou formaté par des instructions particulières. Wikipédia

Vous connaissez peut-être d’autres langages de balisage comme le HTML ou la syntaxe wiki. Ces « langages » consistent simplement à insérer des balises afin de mettre en forme le texte proposé à la lecture.

Par exemple, en HTML, afin de mettre un mot en gras, on peut utiliser les balises <b>Mot en gras</b> pour indiquer que l’on veut que le mot soit affiché en gras. Sur un wiki, on met des apostrophes au nombre de trois de part et d’autre du mot. Ainsi si vous écrivez '''Mot en gras''', cela donnera Mot en gras.

À gauche, iA Writer (Markdown). À droite, Textastic (HTML)

Le problème avec certaines balises, c’est que cela rend le texte peu lisible. Or, comme le dit John Gruber :

HTML is a publishing format ; Markdown is a writing format.

Il s’agit donc d’écrire facilement et lisiblement en vue de publier sur le web (de très nombreuses applications recourent au Markdown : WordPress, Trello, Reddit, Tumblr, Day One Journal, Discord, Bear, etc.)

De fait, si, par exemple, j’écris en HTML « Le Markdown, c’est vraiment pratique ! », je vais obtenir ceci :

<p>Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Markdown" title="Markdown">Markdown</a>, c’est vraiment <em>pratique</em> !</p>

Mais en Markdown, cela donnerait ceci :

Le [Markdown](https://fr.wikipedia.org/wiki/Markdown), c’est vraiment *pratique* !

On remarque que c’est plus épuré, c’est plus lisible en somme et que l’on fait tout en une seule étape. L’écriture et la mise en forme. Votre WordPress — si vous l’utilisez — saura afficher tout ça comme si c’était du HTML. Il y a là un gain de temps appréciable.

Si vous souhaitez obtenir davantage d’informations sur l’intérêt du Markdown, je vous renvoie à l’article Pourquoi écrire en Markdown.

Si vous voulez directement accéder au document présentant la syntaxe du Markdown sans autres explications, je vous renvoie à l’article Le guide du Markdown.

Connaissances de bases à acquérir

Faire un paragraphe

Pour aller à la ligne, appuyez simplement sur la touche . Si vous souhaitez forcer le retour à la ligne, insérez la balise <br />.

Les titres

Comme en HTML, il y a des titres de plusieurs niveaux (1 à 6). On utilise le signe # pour ce faire.

# Titre de niveau 1
## Titre de niveau 2
### Titre de niveau 3
#### Titre de niveau 4
##### Titre de niveau 5
###### Titre de niveau 6

Rappelons que mettre des titres de cette façon permet de construire dans certains documents la table des matières.

Mettre en gras, en italique, surligner ou rayer un mot

  • Pour mettre un mot en italique, placez ce mot entre deux astérisques * : Ce mot est en *italique*.
  • Pour mettre un mot en gras, places-le entre deux astérisques **Ce mot est en **gras**.
  • Pour surligner un mot, placez deux signes égal de part et d’autre : Ce mot est ==surligné==.
  • Pour barrer un mot, encadrez-le d’un double tilde ~~ : Ce mot est ~~barré~~.

Insérer une note de bas de page

Placez [^1] juste après le mot à la suite duquel vous souhaitez insérez une note de bas de page.

Tout en bas de votre document, insérer alors ceci :

[^1]: Ma note de bas de page.

Faire une liste

Liste ordonnée

Pour faire une liste ordonnée, simplement numéroter les lignes suivies à chaque fois d’un point :

1. Élément 1
2. Élément 2
3. Élément 3

Liste non-ordonnée

Pour faire une liste non-ordonnée (c’est-à-dire une liste à puces), vous pouvez utiliser au choix le tiret (-), l’astérisque (*) ou le signe +.

- Élément 1
- Élément 2
- Élément 3

Mettre un lien

Si vous voulez faire un lien vers un site externe, simplement mettre le ou les mots entre crochets (j’utilise sur mon iPad le raccourci ⌘ + parenthèse) suivis du lien mis entre parenthèses, ce qui donne ceci :

[Ralentir travaux](https://www.ralentirtravaux.com)

C’est facultatif, mais vous pouvez inclure une description du lien dans les parenthèses.

[Ralentir travaux](https://www.ralentirtravaux.com "Ralentir travaux, le site du français")

Si vous voulez insérer une adresse email, écrivez votre adresse entourée des chevrons <>: <monadresse@truc.com> .

Insérer une image

Procédez de la même façon que pour insérer un lien, mais en ajoutant un point d’exclamation avant les crochets. L’URL que vous placerez entre parenthèses sera celle de votre image.

![Trois manuels](https://www.ralentirtravaux.com/images/site/trois-manuels.png "Trois manuels")

Insérer un saut de page

Placez trois signes +++.

Insérer une ligne horizontale

Pour créer une ligne horizontale, insérez trois astérisques (***), tiret (---) ou « underscores » (___) à la suite.

Citer du texte

Faite précéder le texte d’un simple chevron > pour faire une citation

> Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
> Tu réclamais le Soir; il descend; le voici

Faire un tableau

Chaque colonne est séparée d’un pipe (| que l’on obtient à l’aide du raccourci ⌘ + ⌥ + L). Pour faire un rang supplémentaire, allez à la ligne et recommencez.

Voici un exemple :

|1re colonne|2e colonne|3e colonne|
|:—|:—:|-:|
|Alignement à gauche|Alignement centré|Alignement à droite|

Ce qui donne :

1re colonne 2e colonne 3e colonne
Alignement à gauche Alignement centré Alignement à droite

Vous aurez remarqué que pour aligner le texte à gauche, on insère :-- dans le deuxième rang. Tandis que pour aligner le texte à droite, on insère --:.

Exemple

Voici un exemple de tableau présentant la conjugaison des temps de l’indicatif.

Temps simples Temps composés
Présent : je suis Passé composé : j’ai été
Imparfait : j’étais Plus-que-parfait : j’avais été
Passé simple : je fus Passé antérieur : j’eus été
Futur simple : je serai Futur antérieur : j’aurai été
Conditionnel présent : je serais Conditionnel passé : j’aurais été
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Itinéraire d’un lecteur gâté : De la liseuse à l’iPad

Deuxième épisode

Épisode 2 Podcast

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Et enfin vint la liseuse

La liseuse est entrée dans ma vie, si ma mémoire ne me joue pas des tours, en 2014.

Rien ne nous destinait à nous aimer. Tout nous opposait ou presque. Je ne lisais que des livres sur papier et je trouvais les liseuses moches. J’aimais les rayonnages des bibliothèques et la dématérialisation des livres me semblaient une bizarrerie que je n’essayais pas même d’interroger.

Je ne sais pas exactement ce qu’il s’est passé. Peut-être, comme on se prend d’affection pour un affreux bâtard au poil roussi, on peut s’emmouracher d’un truc laid fait de plastique bon marché dont l’écran n’affiche qu’un maigre dégradé de noir et blanc.

Pourtant c’est probablement cela qui a fait que cet appareil est devenu si important dans ma vie de lecteur : une interface dont la pauvreté ne résultait pas de médiocres choix ou performances technologiques, mais dont la simplicité était voulue. Il s’agissait de faire oublier l’interface de façon à ce que l’expérience utilisateur – celle de la lecture – soit la meilleure possible, celle d’une concentration sur le contenu et rien d’autres, une expérience similaire à celle que l’on peut éprouver à la lecture d’un texte sur papier, mais sur un écran. Nous y reviendrons.

Kindle sur Instagram

Mais il s’est passé autre chose.

It fades, fades and fades

Vous avez peut-être lu Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes. À un moment, Barthes parle du « fading » qu’il définit ainsi.

“FADING. Épreuve douloureuse selon laquelle l’être aimé semble se retirer de tout contact, sans même que cette indifférence énigmatique soit dirigée contre le sujet amoureux ou prononcée au profit de qui que ce soit d’autre, monde ou rival.

Cet anglicisme vient d’une publicité, « une firme américaine vantait le bleu délavé de ses jeans : it fades, fades and fades. L’être aimé, ainsi, n’en finit pas de s’évanouir, de s’affadir ».

Assez curieusement, c’est un sentiment similaire qui s’est emparé de moi vis-à-vis du livre objet, matériel, physique. Je pense que les multiples déménagements ont fini par me faire prendre en horreur cette quantité démesurée de livres que j’avais amassés avec les années. Il fallait les mettre en carton. Pas trop lourds, les cartons s’il vous plait, sinon c’est intransportable. Et lors de l’emménagement, des heures en perspective de travail : remonter les étagères, placer les livres, les trier, etc.

Et ensuite, s’est passé cette autre chose étonnante. Ces livres auxquels je tenais fermement, toutes ces éditions originales que j’avais achetées souvent fort cher, eh bien ces livres faisaient littéralement l’objet d’un abandon. Ils trônaient sur l’étagère, mais c’est tout ce qu’ils faisaient. La raison en était simple. On ne trimballe pas dans son sac une édition originale. On ne l’annote pas. Parfois, on la manipule avec hésitation car elle est ancienne, fragile. En somme, on ne les lit pas ou peu. Je leur préférais alors leur équivalent de poche, qui étaient mes vrais compagnons de lecture et que je ne craignais pas d’abîmer.

De ce constat découlent deux choses. La première est que notre rapport à la culture est souvent celui d’un collectionneur qui s’accompagne d’un désir d’appropriation de la connaissance sous forme d’objets occupant un territoire bien délimité. C’est aussi une forme d’apparat que l’on exhibe fièrement : voyez ma belle bibliothèque donnant une visibilité tangible de l’étendue de mes connaissances. La seconde est que le ver était dans le fruit. En passant du beau livre à son équivalent de poche (qui a tant fait pour la démocratisation de la lecture mais dont la qualité peut laisser à désirer), je préparais sans le savoir l’étape suivante. Je me dirigeais lentement vers une autre métamorphose, celui de la dématérialisation. Et de repenser au fading de Roland Barthes :

Dans le texte, le fading des voix est une bonne chose ; les voix du récit vont, viennent, s’effacent, se chevauchent ; on ne sait qui parle ; cela parle, c’est tout : plus d’image, rien que du langage.

Cela parle, c’est tout.

On pouvait essayer autre chose, l’essentiel étant que cela parle. Ce serait la liseuse.

Le confort du papier et la plus-value du numérique

Je ne me souviens pas si l’encre électronique était un argument fort pour moi à l’époque. Je crois me souvenir que, à l’époque, la lecture sur iPad se limitait à la lecture d’articles sur le web ou des réseaux sociaux, mais pour la lecture longue, l’iPad ne me paraissait absolument pas adapté du fait de sa vitre et de ses nombreux reflets. De plus, une telle tablette devenait inutilisable au soleil, l’écran n’étant pas assez lumineux en plein jour et l’étant trop la nuit. L’encre électronique offrait une alternative séduisante : le confort du papier avec les possibilités du numérique.

Ces possibilités, je les ai décrites dans un article écrit en février 2016 et intitulé Qu’est-ce que lire au XXIe siècle ?. Je ne vais pas vous les détailler à nouveau. Je pense qu’elles sont désormais bien connues, mais rappelons les principaux avantages de la liseuse.

  1. La liseuse est un appareil léger. Par contraste, l’édition Folio du Comte de Monte Cristo est aujourd’hui composée d’un seul volume, ce qui doit représenter (à vue de nez) un pavé d’une bonne dizaine de centimètres d’épaisseur au bas mot. Et c’est un seul ouvrage ! Partez en voyage avec d’autres ouvrages de Dumas et il vous faudra faire l’acquisition d’une valise supplémentaire.
  2. On trouve les livres facilement. Certains aiment se déplacer chez leur libraire favori. C’est un luxe que je n’ai pas toujours eu. Si vous habitez dans un lieu isolé comme une île, vous savez de quoi je parle. Télécharger un livre et l’obtenir instantanément devient alors une commodité dont on se passe mal une fois qu’on l’a goûtée.
  3. Le crayon devient inutile. Avec une liseuse, on souligne avec son doigt. Cela peut paraître complètement anodin, mais il me plait de voir mon index gagner quelques capacités supplémentaires. La possibilité de souligner est liée à d’autres fonctions que je développerai par la suite.
  4. Le dictionnaire intégré et la traduction m’ont permis d’affronter des ouvrages en langue anglaise que je n’aurais ou pas même ouverts ou lus avec beaucoup plus de difficultés. On se rit parfois des enfants qui, habitués aux écrans tactiles et à la manipulation au doigt de l’interface, reproduisent ces modes d’interaction avec des machines qui ne requièrent pas ces usages, mais je peux vous assurer que je fais pareil quand j’ai entre les mains un ouvrage papier. Je voudrais cliquer sur le mot pour obtenir des informations supplémentaires. Je confesse avoir envie de zoomer également quand d’aventure les caractères sont trop petits.
  5. Synchroniser ses appareils vous permet de lire partout tout le temps. Commencez votre lecture sur la liseuse et poursuivez sur votre téléphone si c’est tout ce que vous avez sous la main. Infiniment pratique dans les transports en commun.
  6. Lire dans le noir. C’est un argument amusant parce qu’il renverse ou neutralise celui des fervents partisans du papier qui vous expliquent doctement qu’il faut charger sa liseuse alors que pour le livre dit « normal » cela ne serait pas nécessaire. D’une part, la batterie d’une liseuse tient des semaines et d’autre part, pour lire la nuit, vous avez besoin d’électricité ! On ne se rend jamais bien compte à quel point nos activités reposent sur la technologie.
  7. Trouver un mot ou une phrase en quelques secondes est probablement, pour moi, l’argument ultime. Je me souviens quand je préparais des cours et que je cherchais un exemple, une phrase, une figure de style et que je passais des heures à chercher le bon ouvrage, la bonne page. Parfois, ma recherche n’était couronnée d’aucun succès, et j’avais cherché en vain. Avec une liseuse, on a l’équivalent du ctrl + f sur une page web. On tape les mots que l’on cherche et ceux-ci apparaissent instantanément.

Les liseuses sont donc, pour toutes ces raisons, des appareils précieux. Et nous n’avons pas même mentionné toutes les fonctionnalités d’accessibilité. Pourtant, je ne regarde plus ma Kindle avec les yeux de Chimène, et je lui préfère à présent mon iPad mini. Que s’est-il passé ? Pourquoi abandonner une machine réunissant tant de qualités ? Je vous l’explique.

En route pour la pomme

Il y a désormais un peu plus d’un an, j’ai acheté la nouvelle Kindle d’Amazon, la Kindle Scribe. C’était un achat prometteur. J’avais déjà eu plusieurs Kindle. J’avais une Oasis. J’étais plutôt comblé.

Mais le grand format de la nouvelle liseuse annonçait des heures heureuses de lecture de PDF et peut-être de BD également. Le stylet qui l’accompagnait me laissait envisager des prises de notes nombreuses, inscrivant mes réflexions sur le vif, avec célérité et efficacité. On pourrait toujours exporter, utiliser un OCR, etc.

kindle sur la plage

Las ! Les possibilités d’export sont quasi nulles. L’application de prise de notes est d’une pauvreté affligeante, le copier coller – comme au temps de l’iPhone premier du nom – n’existe pas et les mises à jour qui vous procurent tout de même quelque maigre espoir sont aussi rares que les cheveux sur le crâne d’un vieillard touchant à sa centième année.

Je regrettais mon achat et maudissais le choix qui m’avait fait repousser la reMarkable quand je comprenais que je ne serais pas plus heureux avec une telle tablette. Là aussi, les possibilités d’export sont minces. Faites votre choix : Google Drive, OneDrive ou Dropbox. C’est pourtant essentiel et ce d’autant plus que la reMarkable est vendue avec 8 maigres petits gigaoctets. Certes, les livres au format ePub ne pèsent généralement pas lourd, mais les PDF peuvent l’être 1.

Je lorgnais alors du côté de la BOOX Tab Ultra C qui offre deux arguments de poids : l’encre électronique est en couleur et, comme c’est une version d’Android (bien ancienne malheureusement), on peut installer des applications, ce qui me permettait d’envisager des applications de prises de notes plus riches que celles d’Amazon (pas dur) et même de télécharger d’autres applications de lecture qui viendraient enrichir l’expérience. Las (encore) ! La tablette s’avérait être un véritable veau. Sa lenteur était désespérante. C’en était trop. Ma décision était prise et je me dirigeai d’un pas alerte vers l’Apple Store le plus proche, acquérir un iPad mini.

Je vous explique, dans le prochain épisode, pourquoi le bonheur (onéreux) était à portée de pomme.

Notes

1 : Je sais bien que ce n’est pas le cas de la majorité des PDF, mais je viens de télécharger sur Gallica Le Larousse du XXe siècle. 717,12 Mo le volume !

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Lecture Technologie

Itinéraire d’un lecteur gâté : Du papier à la machine à lire

Introduction

Épisode 1 Podcast

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Chronique en 10 épisodes

Ami lecteur, toi qui commences la lecture de ces quelques mots, tu t’apprêtes à lire une série d’articles tous consacrés à la lecture numérique et ce que tu lis en est l’introduction. Apprends donc dans quoi tu t’embarques : dix longs articles narrant l’expérience d’un lecteur ayant éhontément abandonné le papier pour lire sur une tablette. Il n’est pas trop tard pour faire demi-tour.

Kindle Oasis

Quelques considérations avant de commencer

Cette série d’articles n’a pas pour ambition de te convaincre. Il ne s’agit pas de t’inviter à délaisser les livres papier. Si tu aimes les objets encombrants jaunissant avec le temps, prenant la poussière, sentant l’acarien, perdant leurs pages, portant le témoignage d’un doigt effaçant sans vergogne l’encre bon marché, alors je n’ai évidemment pas mon mot à dire. Tu fais ce que tu veux. Peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse, disait l’autre.

En réalité, cette série d’articles dont tu commences aujourd’hui la lecture n’a pas d’autre ambition que de proposer le témoignage d’un lecteur heureux ayant le sentiment d’être devenu un meilleur lecteur du fait de son adoption du numérique. Mais, encore une fois, peut-être es-tu parfaitement heureux avec les livres tels que tu les utilises, et je ne vois pas du tout pourquoi je m’efforcerais de te les faire abandonner. En revanche, si tu aimes le plastique bon marché, les nuances de gris, les objets condamnés à une obsolescence non programmée mais inéluctable et préfères les GAFAM aux libraires, tu te laisseras peut-être convaincre à adopter une liseuse ou faire de ta tablette ce que j’ai appelé La machine à lire.

L'iPad, la machine à lire

Et si tu n’as pas été rebuté par les quelques provocations ci-dessus, tu seras peut-être intéressé à l’idée de découvrir les raisons qui m’ont amené à totalement abandonner les livres dans leur version papier pour adopter pleinement des appareils du type liseuse ou tablette.

Mais encore ?

Si je ne veux pas te convaincre et que j’entends te laisser en paix avec tes habitudes, quels objectifs se donnent ces articles ? Pourquoi se donner la peine de produire une dizaine d’articles sur des pratiques forcément personnelles et donc subjectives ? Ne s’agit-il que de te raconter comment je lis ? Est-ce là un simple témoignage ?

À dire vrai, j’entreprends aussi de faire un sort à quelques idées reçues. Il n’est pas rare de lire des articles ayant toutes les apparences du plus grand sérieux et se faisant l’écho de LA recherche et qui entonnent des couplets bien connus : le papier, c’est mieux. Les écrans, c’est mal. On peut le lire aujourd’hui 1. On le lisait déjà il y a dix ans 2, et on paraît ressasser la chose à l’envi, redécouvrant encore et encore les mêmes refrains. Après tout, des figures d’autorité comme Umberto Eco n’ont-elles pas expliqué que le livre était comme la roue ou la cuillère ? Ce sont, ce seraient, des objets dont la forme est parfaite et de ce fait indépassable 3. Fin du débat !

Je suis justement souvent abasourdi par la pauvreté de certains arguments quand on discute d’un tel sujet. En général, un amateur du papier croit pouvoir plier ledit débat en affirmant sa préférence pour l’objet physique et son besoin de toucher ou tourner les pages. En fait, pourquoi pas ? Mais, en général, une personne recourant à cet argument semble se prévaloir d’une tradition pluricentenaire qui lui vaudrait la supériorité du collectionneur féru de beaux ouvrages, laissant le partisan du numérique dans le camp peu enviable des pervers férus du plastique produit par des entreprises assoiffées de DRM, une sorte d’irresponsable qu’on peut réduire à quia en lui faisant comprendre que le beau et le bon sont d’un côté et pas de l’autre.

Pire encore, personne n’est assez patient pour écouter les arguments de celui qui s’aventurerait à décrire les contours d’un écosystème invisible qui est le propre de la lecture numérique, laquelle est protéiforme, omniprésente et riche de possibilités innombrables et inédites que son jumeau de papier n’est pas en mesure d’offrir. Mais n’anticipons pas. Nous y viendrons.

Évolution des pratiques de lecture

Avant de t’exposer tout cela, essayons de nous représenter la chose suivante. Ce que nous appelons « lecture » est une pratique qui n’est pas immuable. Certes, pour beaucoup, elle semble être parvenue à une forme que l’on n’éprouve pas le besoin de changer. Tant et si bien qu’elle ressemble à la représentation qu’en donne le peintre Fragonard. Pourtant, la forme que nous attribuons au livre, le symbole que représente le livre n’est rien moins que figé. Du volumen (le livre enroulé) au codex (le livre à feuilleter), il y a là une belle histoire que la BNF s’est empressée de raconter.

La liseuse de Fragonard

Au reste, au XIIe siècle, la plupart des gens ne savent pas lire. La lecture est de fait essentiellement orale. Au Moyen Âge, un roman est alors un ouvrage en vers écrit en langue romane (d’où son nom). Il est lu à voix haute généralement durant un banquet où on écoute l’histoire. Près de dix siècles plus tard (c’est-à-dire maintenant), on retrouve un peu de cette dimension orale à travers les audiobooks.

Aujourd’hui, la lecture est une activité qu’il est difficile de définir. On ne lit pas que des livres. On vient de le dire, on les écoute également. C’est surprenant mais ce qui était auparavant purement audio peut à présent être lu. Apple Podcast permet maintenant de lire la transcription de chaque épisode, un peu comme on affiche les paroles d’un morceau de musique. De plus, la lecture ne se résume pas à celle des livres. On lit aussi des articles sur le web, des flux RSS (enfin je l’espère), des PDF, des newsletters, des tweets (que je m’obstinerai à appeler ainsi). Souvent ce qui sépare l’un de l’autre est assez flou. On peut en effet légitimement se demander ce qui sépare un thread sur Twitter d’un article de blog.

Apple Podcast

Il est donc bien hasardeux de prétendre que la lecture ne se fait que par les livres. De fait, il nous faut trouver les supports idoines, au risque d’avoir une lecture fragmentée, disparate, dispersée, mais de cela aussi, je te parlerai longuement dans les lignes qui vont suivre.

Du papier à la liseuse, de la liseuse à l’iPad

Pourtant mes propres pratiques ont évolué assez récemment.

En fait, la chose n’allait pas de soi. À dire vrai, la lecture sur papier a longtemps été pour moi le dernier bastion, le dernier résistant dans la bataille que se livraient, dans mon petit cœur de geek, le numérique et le papier. Comme vous le voyez dans mon tout premier post Instagram ci-dessous, la lecture a longtemps été pour moi synonyme de papier et puis un jour j’ai découvert un objet que je tenais à distance, qui faisait de ma part l’objet d’un injuste mépris quand je comparais son plastique médiocre à l’objet rutilant que constituait l’iPad. Pourtant, dès le début (nous sommes en 2010), l’iPad ne me paraissait pas approprié à la lecture. Et c’est précisément cet iPad qui est aujourd’hui ce que j’appelle, non sans une pointe d’émotion, ma machine à lire.

Mon premier post Instagram

Alors que s’est-il passé ? Comment suis-je passé du livre de poche à la liseuse puis à l’iPad ? Quels sont les avantages d’une lecture totalement numérisée ? Y a-t-il des inconvénients et si oui, est-il possible de les surmonter ? C’est ce que je te propose de t’expliquer dans une série d’articles dont le premier fera le récit palpitant qu’est l’irruption de la Kindle dans ma vie.

Pour que tu saches ce qui vient ensuite, voici une brève description des articles qui s’en suivront.

Après cette passionnante introduction (1re partie), après donc avoir discuté des intérêts de la liseuse mais aussi de ses manques (2e partie), je te parlerai ensuite de confort et de capacité de concentration, histoire de battre en brèche quelques idées reçues (3e partie). Ce n’est qu’ensuite que nous ferons le détail des applications qui se trouvent sur ma tablette (4e partie). À la suite de quoi, l’on verra comment conserver, trier, retrouver, mémoriser ces choses innombrables qu’on lit et oublie aussitôt (5e partie). Deux applications constituant le point d’orgue de mon édifice seront ensuite évoquées. Au cas où le suspense serait absolument intolérable, sache qu’il s’agit d’Obsidian et de Readwise (6e partie). Subséquemment, nous nous poserons la question suivante : la lecture devient-elle une affaire de geek ? Il sera alors question d’automatisation, d’intelligence artificielle, de scripts (7e partie). Dictionnaires et applications de traduction seront l’objet de l’article suivant (8e partie). Afin de ne point être accusé d’ignorer les problèmes qui ne manquent pas d’émailler nos vies numériques, l’avant-dernière partie est intitulée Les maux du numérique (9e partie donc). On en profitera pour voir comment les affronter. Il sera alors temps de conclure (et c’est la 10e partie).

Notes

1: Voir par exemple Les écoles doivent privilégier le papier et le crayon dont le sous-titre est « La lecture à l’écran est nuisible alors que la prise de notes au clavier n’apporte aucun avantage, selon un rapport de l’INSPQ. »
2: Lire sur support papier, meilleur pour la compréhension des textes ?
3: Lire mon article intitulé Umberto Eco et le livre indépassable

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Éducation Pédagogie Technologie

La vidéo a-t-elle révolutionné l’éducation ?

Il y a quelque temps de cela déjà, je formulais la réflexion suivante sur Twitter et LinkedIn :

Ne croyez pas ceux qui affirment que l’IA va bouleverser radicalement l’éducation. Aucune technologie ne l’a fait auparavant (ni la radio ni la vidéo ni internet ni les MOOCS ni la réalité augmentée ou virtuelle ni rien). La technologie change notre rapport au savoir mais, au sein même de l’école, son impact est généralement minime.

J’oubliais, soit dit en passant, la blockchain, la 5G et le Metavers.

Ce que je ne pouvais formuler en quelques mots était en fait la thèse de Justin Reich qui expliquait dans Failure to disrupt :

new technologies do not disrupt existing educational systems. Rather, existing educational systems domesticate new technologies

Dans sa conclusion, l’auteur prévenait d’ailleurs :

In the years ahead, no doubt, entrepreneurs will make these same kinds of promises about artificial intelligence and virtual reality and 5G and whatever new technologies Silicon Valley unleashes upon the world.

Mon objectif n’étant pas de citer Justin Reich tout au long de ce billet, résumons et expliquons très brièvement ce qui vient d’être formulé avant d’en venir au sujet qui nous préoccupe. Pour l’auteur de Failure to disrupt, la technologie ne bouleverse pas radicalement le système éducatif. En fait, la plupart du temps, ce dernier absorbe la technologie et lui fait faire ce que l’on faisait auparavant. Par exemple, si vous faites écouter une vidéo à vos élèves où quelqu’un expose une notion, vous ne faites que proposer à vos élèves un cours magistral et en cela, il n’y a rien de neuf. On pourra distinguer quelques apports, mais la technologie ne transforme pas radicalement le processus éducatif.

Or il m’a été objecté qu’internet ou justement la vidéo, par le truchement de YouTube, avaient révolutionné l’école. Il n’en est rien. Si la thèse consiste à dire qu’internet ou YouTube ont modifié nos vies, ont changé notre rapport au savoir, ont contribué à la circulation de l’information, ont même transformé notre façon de travailler à la maison, oui. Mais, à l’école, la plupart du temps, il n’en est rien.

Retour vers le futur

Mais reprenons.

Tout d’abord, l’introduction de la vidéo a été annoncée comme étant une révolution qui rendraient les livres obsolètes. C’est Thomas Edison qui le dit en 1913.

Books will soon be obsolete in the public schools. Scholars will be instructed through the eye. It is possible to teach every branch of human knowledge with the motion picture. Our school system will be completely changed inside of ten years. The New York Dramatic Mirror

En 1994, d’aucuns prétendaient que les vidéodisques allaient (enfin ?) révolutionner les salles de classe :

The use of videodiscs in classroom instruction is increasing every year and promises to revolutionize what will happen in the classroom of tomorrow (Semrau & Boyer. Propos entendus dans The Most Persistent Myth. Regardez. c’est assez drôle)

On pourrait penser qu’après presque 100 ans de prédictions ratées, on arrêterait là, mais non. Salman Kahn remet ça en 2011 dans Let’s use video to reinvent education. En gros, il explique que grâce à la vidéo les enseignants seront bientôt obsolètes et Bill Gates de confirmer :

Well, it’s amazing. I think you just got a glimpse of the future of education.

Évidemment, si on vous demande si la Kahn Academy a eu un quelconque impact dans la Silicon Valley voire dans nos vies, il faudrait être obtus pour ne pas le reconnaître, mais est-ce que le monde de l’éducation a été réinventé comme le dit Sal Kahn ? Non, bien sûr. Est-ce que la vidéo est désormais « le futur de l’éducation », comme le pense Bill Gates ? Non plus.

Un an plus tard, la croyance est pourtant plus forte que jamais. Daphne Koller, qui a cofondé Coursera, déclare que les MOOCs vont révolutionner l’éducation.

Le but de Coursera

is to take the best courses from the best instructors at the best universities and provide it to everyone around the world for free

Et comment fait-on cela ? Avec des vidéos bien sûr (reconnaissons-le, pas seulement. Il y a aussi… des quiz). Or, pour citer Reich encore une fois, peu de MOOCs ont apporté une véritable expérience pédagogique :

most courses simply recorded a professor lecturing, harkening back to the earliest days of motion pictures when the first order of business was the filming of stage plays.

Force est de reconnaître que la révolution n’a pas eu lieu. En tout cas, pas celles des MOOCS. Les livres ne sont pas obsolètes et la transmission des connaissances, dans les salles de classes, ne semble pas se faire par le seul moyen de la vidéo. Même le plus fervent adepte de la classe inversée reconnaîtra que la vidéo elle-seule ne suffit pas. Elle s’inscrit dans un processus plus large. Et ce processus inclut un ensemble protéiforme de technologies.

Cette combinaison de technologies peut expliquer le succès de l’une d’elles, mais ignorer cette pluralité serait une erreur. Ainsi, si Salman Kahn revient à la charge en 2023, c’est à la faveur de l’IA qui va permettre à la Kahn Academy de connaitre un regain d’intérêt.

On voit que le discours est maintenant : la vidéo va réinventer l’éducation mais cette fois avec le concours de l’IA.

Et c’est intéressant parce qu’on voit là qu’une technologie se combine à une autre pour permettre son essor. De ce point de vue, dire que la vidéo a révolutionné l’éducation serait oublier combien internet est responsable de son succès en permettant sa diffusion. Exactement de la même façon, internet s’est développé très rapidement parce qu’une autre technologie lui préexistait et permettait son adoption : le téléphone.

Ainsi, l’utilisation de la vidéo n’a de manière générale pas tellement lieu en classe (et c’est tant mieux. Pourquoi accorderait-on du temps de classe pour quelque chose qui peut facilement se faire partout et seul), et c’est en cela qu’on ne peut pas dire que la vidéo est une révolution. Elle n’a produit aucun bouleversement ni renversement. Elle est venue renforcer l’arsenal de l’enseignant. Couplée aujourd’hui à des plateformes comme Edpuzzle et un LMS comme Google Classroom et demain à l’IA, on a là un dispositif assez puissant, mais ce n’est pas une « transformation complète » comme l’indique la définition du Petit Robert.

Mais quand même, c’est super bien, YouTube !

La possibilité de regarder une vidéo sur YouTube ou Udemy est une avancée dont on se passerait douloureusement, mais ces plateformes n’ont pas révolutionné le monde de l’éducation.

Ce n’est d’ailleurs pas durant la pandémie que cette révolution a eu lieu alors que la vidéo – sous forme de visioconférence – s’est imposée comme moyen de transmission essentiel dans beaucoup de pays. Nombreux sont en effet les enseignants qui sont passés du bureau de leur salle de classe à celui de leur maison, et ont juste allumé la caméra et parlé (il n’est absolument pas question de leur jeter la pierre cela dit).

On voit donc bien, quoi qu’en dise Sal Kahn (voir la vidéo ci-dessous), qu’entre l’introduction du film en 1913 puis les vidéodisques, les cassettes, les DVD, les blue-rays et enfin internet, l’utilisation de la vidéo n’a rien d’une nouveauté, et qu’elle n’affecte en rien les pratiques scolaires existantes (i.e. la transmission d’informations).

Audrey Watters dans Teaching Machine, évoquant The History of Education (toujours Salman Kahn) ne dit pas autre chose :

There’s at least one problem with the way Khan tells it: the history is all wrong.
Despite Khan’s claim in his TED Talk that to “use video to reinvent education” is a novel idea, classrooms have been using film for over one hundred years.

L’introduction de la vidéo n’est donc pas nouvelle. Sa diffusion est évidemment plus aisée voire plus confortable qu’avant, mais elle n’est pas récente. Cela devrait nous inciter à nous méfier du mot « révolution ». Je suis assez vieux pour avoir été collégien dans les années 80 et j’ai connu le rétroprojecteur, le magnétoscope ou encore le plan informatique pour tous. Il faut se méfier de l’emploi de certains mots. L’innovation comme la révolution sont parfois plutôt… vieilles.

Pourtant, Kahn me semble marquer quelques points quand il dit que la vidéo peut être regardée quand on veut, à son rythme par exemple. Mais André Tricot, dans L’Innovation pédagogique, explique que la vidéo ne permet pas de mieux apprendre.

Les vidéos ne permettent pas d’apprendre mieux qu’en cours en présentiel, même si les opinions des étudiants et des élèves sont généralement favorables, notamment parce qu’elles leur offrent la possibilité d’apprendre « quand ils veulent », « où ils veulent », et « sur n’importe quel support » (Evans, 2008). La complémentarité et la synchronisation entre ce que dit l’enseignant et ce qui est montré à l’écran (diapositives, illustrations, graphiques, tableaux de données, etc.) est une condition absolument cruciale d’un apprentissage avec ce type de média (Mayer, 2014).

Il explique également en quoi la vidéo finalement n’a pas supplanté le texte, même s’il ne présente pas les choses en ces termes.

Notons pour finir qu’un autre média sans interaction, le texte, permet de lire les mêmes mots qu’un discours oral mais deux à trois fois plus rapidement (Vandenbroucke, 2016 ; Kushalnagar, Lasecki & Bigham, 2012). La lecture permet à l’élève de réguler sa vitesse, allant plus vite pour les passages faciles, plus lentement pour les passages difficiles (Young & Bowers, 1995). Le texte est permanent, la vidéo est transitoire : dès que j’ai entendu un mot je ne l’entends plus, je ne peux pas rester sur un mot entendu, tandis que je peux rester sur un mot lu (Leahy & Sweller, 2011).

Et enfin, pour le citer une dernière fois, l’auteur de l’ouvrage publié dans la collection Mythes et réalités explique pourquoi la vidéo ne remplace pas le cours magistral (avec une point d’ironie).

Une vidéo peut ainsi remplacer un cours magistral. Ce qui est assez remarquable parce que cela voudrait dire que (a) l’interaction entre un enseignant et ses étudiants lors d’un cours magistral est nulle et que (b) les élèves apprennent mieux en écoutant-regardant une vidéo d’un enseignant qui parle plutôt qu’en lisant le texte correspondant (ou un autre support). Or, en l’état actuel de nos connaissances tout cela est faux : au contraire, l’interaction entre un enseignant et ses étudiants lors d’un cours magistral est prodigieusement importante ; regarder une vidéo d’un enseignant qui parle n’est sans doute pas la façon la plus efficace d’apprendre, et de loin.

Regarder une vidéo ne serait ainsi pas le meilleur moyen d’apprendre (cela dépend en fait de ce que vous apprenez).

Évidemment, il y aurait beaucoup à dire parce que, pour ma part, je regarde énormément de vidéos et j’apprends beaucoup. J’utilise par exemple Otter ou Reader pour en avoir une transcription textuelle que je peux recopier dans Obsidian afin d’en souligner les passages importants, les compléter, les définir, etc. Dans la dernière version de Mac OS, je peux même souligner le texte d’une vidéo et le recopier, etc. Très pratique quand on apprend à coder. En outre, l’IA permet des merveilles et outre la transcription, on peut avoir un résumé, une liste des points saillants ou générer un quiz.

La technologie n’est pas la solution

Malheureusement, nous ne sommes pas là pour parler de mes usages et on voit bien que la vidéo à elle seule ne suffit pas, parce qu’en fait, redisons-le, une technologie quelle qu’elle soit ne suffit pas. Ainsi, le très récent rapport de l’UNESCO, Technology in education- a tool on whose terms, fait valoir que la télévision, comme la radio auparavant et comme internet par la suite, a été utilisée pour atteindre un public qui ne pouvait pas accéder à l’école :

Television has been used for delivering distance learning since the 1950s, notably in Latin America, to help address qualified teacher shortages in rural areas and high teacher absenteeism rates

Et ce avec un certain succès, mais précisément en raison de la complémentarité des éléments constituant un processus pédagogique excédant la technologie elle-même :

Lessons are often used to complement face-to-face instruction, with long-term studies finding significant impact on enrolment and completion rates. Success has been partially attributed to community participation and ongoing teacher training, while the use of in-person tutors, printed guides and videos that prompt learners to answer questions has made interventions more interactive.

La formation des enseignants ou d’autres facteurs (comme les guides imprimés ou l’interactivité s’ajoutant au support même) sont donc déterminants pour qu’une technologie connaisse un certain succès qu’elle n’aurait pas sans cela.

C’est d’ailleurs la conclusion du chapitre 2 de ce rapport :

Technology should not be viewed as the solution, but as a supportive tool in overcoming certain barriers to education access. The most effective interventions are those that put learners’ interests as the focal point and support human interaction, making use of adequate in-person support, extensive teacher training and appropriate technology for the specific context. The best learning systems never rely on technology alone.

Reste qu’une plateforme (rien que le mot pourrait à lui seul prolonger démesurément la réflexion) comme YouTube peut même être perçue comme un objet inquiétant si l’on en croit l’article du New Yorker How YouTube Created the Attention Economy. Ainsi, il faudra aussi penser à éduquer nos élèves à mieux comprendre et utiliser ce gigantesque réseau qui semble mobiliser tous les regards. La vidéo peut alors être perçue comme une technologie qui n’a pas révolutionné l’école, qui n’est pas neutre et dont l’utilisation peut dans certains cas s’avérer contre-productive. Mais c’est là un sujet pour un autre article.

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Éducation Pédagogie Technologie

5 exemples concrets précédés de réflexions sur l’importance de la collaboration

Dans le cadre de mon travail au LFI, j’écris tous les quinze jours une newsletter. J’y fais le point sur les formations que nous avons accomplies, annonce celles que nous ferons bientôt, partage l’actualité éducative ou propose quelques réflexions pédagogiques voire technologiques. Dans les deux dernières, je parlais de la collaboration, un sujet qui me tient à cœur depuis de longues années et dont l’intérêt a été récemment ravivé par la lecture de l’excellent ouvrage Faire collectif pour apprendre de Laurent Reynaud auquel la deuxième partie de cet article doit énormément.

Faire collectif pour apprendre

J’avais tout d’abord exposé quelques réflexions sur les raisons qui font que la collaboration est un enjeu essentiel. C’est une compétence qui a assuré la survie de l’espèce. Je donnais ensuite quelques exemples concrets susceptibles d’être appliqués en classe.

Pourquoi collaborer

On promeut souvent la collaboration comme une compétence à acquérir par nos élèves. Mais apprendre à collaborer n’a rien d’évident.

Tout d’abord, elle se heurte à différentes représentations. Par exemple, on s’imagine bien souvent l’individu isolé, œuvrant dans la solitude à la réalisation d’une tâche quelle qu’elle soit. C’est en fait un penseur de Rodin dont la nudité nous révèle que la pensée est dépouillée de tout outil.

Rien n’est plus faux. Daniel Bougnoux nous rappellerait que le célèbre penseur, « nu, concentré sur lui-même,  sans le secours d’aucun livre, clavier, écran ni artefact quelconque » ne pense pas (La condition médiologique). Peut-être qu’il songe, qu’il rêvasse ou même délire, mais pour penser, organiser, développer, noter, structurer, diffuser, communiquer, nous avons besoin d’outils. Bougnoux expliquerait donc que « l’homme seul ne pense pas » et Yuval Noah Harari confirmerait.

Le penseur de Rodin

Dans 21 leçons pour le 21e siècle (Partie IV Vérité, 15. Ignorance: Vous en savez moins que vous ne le pensez), l’auteur nous dit que l’individualité est un mythe :

Les humains pensent rarement par eux-mêmes. Nous pensons plutôt en groupe.

Aucun individu ne sait à lui tout seul construire une cathédrale, une bombe atomique ou un avion par exemple. Harari évoque ensuite une théorie intéressante : L’illusion de la connaissance (Steven A. Sloman and Philip Fernbach). Il apparaît que nous nous reposons sur l’expertise des autres pour pratiquement tous nos besoins. Et le fait est que si je devais expliquer comment fonctionne mon robinet, détailler les différentes opérations qui mènent au démarrage d’une voiture ou à la production du paracétamol ou des chaussures que j’ai aux pieds, je serais bien embarrassé.

Mais revenons aux penseurs, aux génies et à leurs inventions.

Collaborer est notre force

Walter Isaacson dans Les innovateurs (chapitre 2, L’ordinateur), cherchant à qui attribuer l’invention du premier ordinateur et essayant de démêler l’influence que les uns ont pu avoir sur les autres, prend l’exemple du procès intenté à l’encontre d’Eckert et Mauchly (les inventeurs de l’ENIAC). Mauchly s’était grandement inspiré des travaux de John Atanasoff.

Certes les idées qu’Eckert et Mauchly ont mis en pratique n’étaient pas toutes les leurs, mais ils ont su, puisant dans une multiplicité de sources, les appliquer, réaliser ce qu’ils avaient imaginé en étant aidé d’une équipe compétente et leur invention a eu un impact considérable dans l’histoire de l’informatique. Combien d’inventeurs ont manqué d’une telle équipe, des fonds nécessaires, et n’ont pu parvenir à réaliser leur vision ? Eh bien, c’est le cas de John Atanasoff.

Pourquoi un tel génie comme Atanasoff a-t-il disparu dans les catacombes de l’histoire et pas Mauchly ? Voici la réponse de Walter Isaacson :

La façon dont vous classez les contributions historiques des autres dépend en partie des critères que vous choisissez. Si vous êtes séduit par le romantisme des inventeurs solitaires et que vous vous souciez moins de savoir qui a le plus influencé les progrès dans tel domaine, vous pourriez placer Atanasoff et Zuse en tête de liste. Mais la principale leçon à tirer de la naissance des ordinateurs est que l’innovation est généralement un effort de groupe, impliquant une collaboration entre les visionnaires et les ingénieurs, et que la créativité provient de l’utilisation de nombreuses sources. Il n’y a que dans les livres de contes que les inventions surgissent comme un coup de tonnerre, ou comme une ampoule s’illuminant dans la tête d’un individu isolé dans une cave, un grenier ou un garage.

Donc non seulement l’homme ne pense pas seul. Il ne peut pas. Il se repose beaucoup sur les autres mais de surcroît le produit des grands inventeurs est le résultat d’un travail d’équipe. Et avouez que ni Christophe Colomb n’est arrivé en Amérique tout seul en ramant, ni Isaac Newton n’a pu produire sa théorie comptant sur son seul génie et aussi une pomme. Après tout, nous ne sommes que des nains juchés sur des épaules de géants, n’est-ce pas ?

De surcroît, si l’homme, cette créature insignifiante apparue il y a quelque 70 000 années, à peine plus importante que la mouche ou le pivert, en est venue à dominer le monde, c’est en raison de sa capacité à collaborer.

Regardez cette vidéo dans laquelle Yuval Noah Harari explique que la force des êtres humains est de savoir collaborer avec un très grand nombre d’individus et qui leur sont totalement étrangers. La démonstration est édifiante.

Mais alors, en ce cas, pourquoi l’école ne promeut-elle pas davantage cette capacité à collaborer ? Comme le rappelle Ken Robinson (et Ian Clayton) :

Dans le monde du travail, la collaboration et le travail d’équipe sont essentiels à la réussite ; à l’école, on appelle cela tricher.

Nous savons donc qu’il est important de collaborer. Cela a été une des compétences qui a assuré la survie de l’espèce. Mais comment développons-nous cette compétence chez les élèves ? Voici cinq conseils facilement applicables.

5 conseils pour apprendre à collaborer

Conseil #1

Évitez de donner un travail à faire à plusieurs élèves si celui-ci peut être fait par un seul. Si vous voulez convaincre les élèves de la nécessité de travailler à plusieurs, il faut que la tâche demandée l’exige. Ce n’est pas moi qui le dis. C’est André Tricot dans L’innovation pédagogique.

Conseil #2

Le travail collaboratif peut représenter un surcoût cognitif chez les élèves (c’est encore Tricot qui le dit). Une solution peut consister à donner un « script » aux élèves découpant en sous-tâches les travaux à réaliser. Chacun a alors un rôle précis à jouer et une sous-tâche à réaliser à un moment donné. Voici un exemple que j’ai rédigé pour l’analyse de texte en classe de première.

Répartition des tâches

Conseil #3

Si l’on veut favoriser le travail collaboratif, il est préférable d’éviter de noter la production finale. On évitera ainsi que certains élèves fassent tout le travail. On évitera également les conflits si, dans le groupe, des élèves ne fournissent pas le travail attendu. On recommandera également de faire précéder le travail collectif d’un travail individuel pour que chacun puisse avoir quelque chose à apporter au groupe. Enfin, on organisera le travail en groupe pour éviter la répartition spontanée des rôles.

Il est au reste possible de s’en remettre au hasard pour favoriser la mixité des élèves en utilisant une application comme Flippity. J’aime beaucoup le Random Name Picker, lequel permet aussi de créer des groupes aléatoirement. Voyez aussi celui-ci pour construire des groupes et assigner des tâches.

Assigner des tâches

Conseil #4

Toujours en classe de français, voici un autre scénario possible pour apprendre à commencer une introduction. On propose quatre ou cinq phrases d’accroche et les élèves doivent d’abord individuellement les classer par ordre de pertinence ou de préférence et justifier brièvement leurs choix. Plus tard, en groupe, ils doivent discuter de ces choix et les confronter à ceux des autres. Il faut alors argumenter et défendre son point de vue.

Une restitution collective est possible durant laquelle un classement de référence est établi par l’enseignant. Cela permet de mesurer l’écart entre le choix des élèves et celui qui vient d’être décidé collectivement. 

Conseil #5

Voici un dernier exemple puisé dans Faire collectif pour apprendre de Laurent Reynaud dont je vous recommande la lecture (les précédents exemples étaient simplement inspirés de Laurent Reynaud). Il s’agit de donner un travail écrit aux élèves. L’évaluation repose sur un simple code couleur et est dépourvue de tout commentaire.

Evaluation

J’aime beaucoup cette idée, car elles forcent les élèves à chercher et à s’entraider pour comprendre leurs erreurs:

Si les élèves qui ont un rond vert sur leur copie ne s’inquiètent pas, les autres s’activent pour comprendre leur couleur et améliorer leur travail. Ils se tournent vers leurs camarades qui ont une couleur supérieure à la leur ou bien ouvrent leurs classeurs. Ils n’ont pas d’annotations sur la copie, cela rend nécessaire les interactions pour comparer leur propre production à celle des autres.