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On

« on » est un mystère grammatical, une aporie dans une vaine tentative de classement.
Tout d’abord, sa métamorphose est surprenante puisqu’il s’est transformé en ce qui est censé le remplacer. Autrefois un nom (du latin homo, hominis), il est devenu un pronom dont la tournure « l’on » (utilisée essentiellement pour éviter un hiatus) témoigne encore.
Ne désignant généralement personne (il est pour cela appelé pronom indéfini), il est rangé parmi les pronoms personnels.
Enfin, mot singulier, il est trop souvent ressenti comme un pluriel. En effet, nombre d’individus s’obstinent à accorder le participe passé avec « on ».
Récemment, j’ai encore lu ceci : « On s’est bien amusés ».
Sauf erreur de ma part, le sujet étant au singulier, l’auxiliaire également, le participe devrait l’être aussi. Pourquoi accorder ce participe en dépit du sujet et de l’auxiliaire au singulier ?
La seule réponse — peu satisfaisante — est que ce « on » est ressenti comme un pluriel. Il est d’ailleurs pronominalisable en « nous » : « Nous, on s’est bien amusés »
Dans ce cas, ce n’est plus la grammaire (un ensemble de règles morpho-syntaxiques et sémantiques) qui prévaut, mais le seul critère sémantique, un peu comme avec « la plupart ». On dira, en effet, « La plupart se sont amusés » et non « La plupart s’est amusé » (ça peut se comprendre. La tournure est elliptique. Il faut entendre «La plupart des gens se sont amusés »). On reconnaîtra que la grammaire est constituée de tout cela ; ce sont la morphologie, la syntaxe et le sémantisme qui font la grammaire, et que parfois démêler entre ces trois-là est bien difficile.
En ce cas, je ne peux m’empêcher de penser, qu’il faudrait aller jusqu’au bout et écrire : « On se sont bien amusés ». On ne choisirait pas le sémantisme au détriment de la morphologie, mais on contreviendrait à une autre règle, celle de l’euphonie. Il faut que ça sonne à l’oreille !
Le plus simple ne consisterait-il pas à considérer que « on » est singulier et que le participe ne s’accorde pas ?
Bref, quand on m’interroge au sujet de ce « on », je n’ai pas grand-chose de plus satisfaisant à dire que ce que j’ai écrit ici.

2 réponses sur « On »

Comme j’ai laissé hier un message ( sur Projet Voltaire) concernant justement un certain ” on se serait bien amusés”, que je reprochais à un anglais maîtrisant parfaitement le français, je suis ravie de trouver là une réponse millimétrée à mon interrogation! Il dit que ce s à “amusé” n’est peut-être pas orthodoxe, mais qu’il est “toléré” et que “tout le monde le fait en pensant bien faire!
Je vais lui envoyer votre texte . Il enseigne l’Occitan à l’université de….Minneapolis….
Michèle Buchet ,en Charente.

Bonjour Michèle,

Si je devais écrire un article sur le sujet qui nous préoccupe, reprenant Voltaire, je l’intitulerais « La langue comme elle va ».

Votre anglais a très certainement raison quand il dit que « tout le monde le fait ». Tout le monde, ce sont les gens comme vous et moi, mais aussi les journalistes, les écrivains, les éditeurs, etc.

Je ne vois pas trop ce que l’on peut y faire ! Mettre un « s » au singulier me laisse profondément perplexe, mais l’usage est plus fort que nous. Au reste, il y a fort à parier que cette mode ait des racines très profondes. Tenez ! un autre exemple : j’ai pris conscience de cet enracinement des modes en lisant madame de Sévigné qui parle de « mélange trop joli de vert et de rouge ». Cet adverbe employé à tort et à travers par les ados pointait déjà le bout de son nez dans la correspondance de cette grande dame.

La lutte est inutile.

Mais je ne mettrai pas de « s » quand même !

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