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Le texte et les questions

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Dans Histoire de ma fuite des Plombs, Giacomo Casanova raconte comment il a été injustement incarcéré à Venise dans la prison appelée les Plombs. Le passage qui suit montre de quelle manière le prisonnier avait tout d'abord songé à s'évader lorsque le geôlier (Laurent) arrive.

J'ai fixé le moment de mon évasion dans la nuit précédant la fête de saint Augustin, non pas tant parce qu'il y avait déjà plus de quatre semaines que je l'avais fait mon protecteur, comme parce que je savais que dans cette fête-là le Grand Conseil s'assemblait, et que par conséquent il n'y aurait pas de monde à la boussole contiguë (1) à la chambre par laquelle je devais nécessairement passer en me sauvant. J'ai donc fixé de sortir dans la nuit du vingt-sept.
La journée du vingt-cinq, à midi, il m'arriva ce qui me fait frissonner encore dans ce moment où je vais l'écrire. À midi précis j'ai entendu le glapissement des verrous : j'ai cru de mourir. Un violent battement de cœur, qui frappait plus de six pouces plus bas que sa région, me fit craindre mon dernier moment : je me suis jeté éperdu sur mon fauteuil. Laurent en entrant me dit, mettant la tête à la grille, et avec un ton de jouissance : Je viens, Monsieur, vous porter une bonne nouvelle, dont je vous félicite. J'ai d'abord cru que c'était celle de ma liberté, car je n'en connaissais pas d'autre qui pût être bonne ; et je me voyais perdu : la découverte du trou aurait fait révoquer ma grâce. Laurent entre et me dit d'aller avec lui ; je lui réponds d'attendre que je m'habille : N'importe, me dit-il, puisque vous ne faites que passer de ce vilain cachot à un autre clair et tout neuf où par deux fenêtres vous verrez la moitié de Venise, où vous pourrez vous tenir debout, où... Mais je n'en pouvais plus, je mourais ; je le lui ai dit. J'ai demandé du vinaigre (2) en le priant d'aller dire à M. le Secrétaire que je remerciais le tribunal de cette grâce, en le suppliant au nom de Dieu de me laisser là. Laurent me dit avec un grand éclat de rire que j'étais fou : que le cachot où j'étais s'appelait l'enfer, et que celui où il avait ordre de me mettre était délicieux. Allons, allons, ajouta-t-il, il faut obéir, levez-vous. Je vous donnerai le bras, et je vous ferai d'abord porter toutes vos hardes (3), et tous vos livres. Etonné et en devoir de ne plus répliquer le moindre mot je suis sorti, et j'ai dans l'instant ressenti un petit soulagement en l'entendant ordonner à un des siens de le suivre avec mon fauteuil. Mon esponton (4) était caché dans sa paille : c'était toujours quelque chose. J'aurais voulu me voir suivi par le beau trou que j'avais fait avec tant de peine, mais c'était impossible : mon corps allait, mais mon âme restait là.

Giacomo Casanova, Histoire de ma fuite des Plombs, première partie, pp.89-90

Notes :

1 - C'est-à-dire qu'il n'y aurait personne dans la pièce à côté de la chambre.
2 - Manifestement un remède de l'époque utilisé lorsqu'on ne se sentait pas bien.
3 - Ensemble des effets personnels (vêtements, linge et même meubles voyageant avec les bagages).
4 - Demi-pique (portée jusqu'à la Révolution par les bas officiers d'infanterie) utilisée par Casanova pour s'évader.


Questions (15 points)

Le narrateur (4 points)

1. À quelle classe grammaticale appartient le mot « je » ? (0,5 point)
2. Qui ce mot désigne-t-il ? (0,5 point)
3. D'après le texte et le paratexte, dites qui raconte l'histoire. (0,5 point)
4. Relevez les temps et le mode employés dans la phrase « La journée du vingt-cinq, à midi, il m'arriva ce qui me fait frissonner dans ce moment où je vais l'écrire ». (1,5 point)
5. D'après la phrase citée dans la question 4, dites si le narrateur est toujours en prison au moment où il écrit. Justifiez très précisément votre réponse. (1 point)

Un contretemps (8 points)

6. Quel est l'autre personnage de ce texte? Comment est-il appelé? (0,5 point)
7. Que vient-il annoncer au narrateur? (0,5 point)
8. De quelle façon l'annonce-t-il? Dites s'il s'agit d'une bonne ou mauvaise nouvelle selon ce personnage. Relevez ensuite un champ lexical confirmant votre réponse. (1,5 point)
9. Quels sont les sentiments du narrateur au moment où l'on rentre dans sa cellule. Pourquoi ? (1 point)
10. Le narrateur apprécie-t-il les nouvelles qu'on lui apporte? Expliquez et justifiez votre réponse en relevant un champ lexical montrant les sentiments du narrateur.(1,5 point)
11. Pour quelle raison la phrase (N'importe, me dit-il, puisque vous ne faites que passer de ce vilain cachot à un autre clair et tout neuf où par deux fenêtres vous verrez la moitié de Venise, où vous pourrez vous tenir debout, où... ) s'achève-t-elle par des points de suspension ? Quel sentiment du narrateur traduisent-ils ? (1 point)
12. Trouvez deux types de discours rapportés et nommez-les. (2 points)

L'évasion (3 points)

13. Quand le narrateur avait-il décidé de s'évader? Dites pourquoi il avait choisi ce moment. (0,5 point)
14. Par quels moyens devait-il s'évader? (0,5 point)
15. Expliquez la phrase "mon corps allait, mais mon âme restait là" ligne 25. (1 point)
16. Donnez la valeur du connecteur « mais » et transformez la phrase en proposition subordonnée en respectant cette valeur (1 point)

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