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Ulysse et l'Odyssée de Martine Laffon

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Ulysse et l'Odyssée
Lire Ulysse et l'Odyssée

Lire L’Odyssée est toujours une excellente idée.

D’ailleurs, Roland Barthes a écrit quelque part que deux récits fascinaient les hommes : celui d’un dieu qui avait envoyé son fils et que les hommes avaient tué, celui d’un homme qui mit vingt ans à rentrer chez lui luttant seul contre la colère d’un dieu.

Mais, pour l’enseignant, la question est toujours la même : comment donner accès à cette œuvre majeure ?

Le texte de Martine Laffon est une solution.

J’ai trouvé excellente l’idée de cette auteure qui a choisi de réécrire L’odyssée pour la rendre accessible aux jeunes lecteurs et non pas de proposer, comme le font beaucoup d’éditions, les passages les plus célèbres. Le choix de la réécriture me paraît judicieux en ceci qu’il évite l’insipide récit tronqué, sélection de passages lus et relus, délaissant tels ou tels plus ou moins arbitrairement. Un texte « intégral » propose un tout cohérent, sans coupures, sans résumés explicatifs inopportuns. En revanche, comme à l’accoutumée, l’histoire de Télémaque est délaissée pour se concentrer sur le seul Ulysse. Finalement, quel élève connaît Télémaque ? Quel auteur racontera son histoire ?

J’ai trouvé aussi excellente l’idée du double narrateur : le premier, en un récit mené à la troisième personne, présente un Ulysse moribond qui, dans un élan proustien, veut se souvenir et par là même donner du sens à sa vie en en faisant le récit ; le deuxième, en un récit mené à la première personne cette fois, est Ulysse qui compte ses propres aventures passées.

L’ensemble est écrit simplement et se veut l’occasion de donner un peu de culture grecque par la même occasion. Malheureusement, malgré tout cela, je n’ai pas vraiment pris de plaisir à lire cette adaptation. En fait, je l’ai trouvée décevante. On retrouve de façon assez prévisible la plupart des épisodes constituant le périple d’Ulysse mais sans grande originalité. Au début de ma lecture, je me suis dit que ça allait être bien, parce que j’aimais cette idée d’un héros vieillissant, se retournant sur un passé faisant à la fois sa fierté et sa souffrance. C’était l’occasion de présenter, même à de jeunes lecteurs, une véritable réflexion, notamment sur la nature complexe d’Ulysse.

Ulysse, en effet, est cet homme qui n’aspire qu’à connaître le monde qui l’éloigne de chez lui. C’est alors un savoir délétère qui l’entraîne vers le danger : savoir qui habite cette grotte (ce sera Polyphème), savoir qui habite telle île (ce seront les Lestrygons ou plus tard Circé chez qui il restera un an), savoir ce que chantent les sirènes… Et dans le même temps, Ulysse n’aspire qu’à rentrer chez lui, dans son foyer.
Ulysse, c’est également, l’homme aux mille ruses, le héros que tous admirent, le combattant de Troie, l’homme qui a affronté la colère de Poséidon. Mais c’est aussi un homme qui, par orgueil, est resté vingt ans éloigné de chez lui, qui a laissé seule sa femme en proie aux terribles prétendants, qui a laissé seul son fils également qu’il n’aura pas vu grandir, qui a provoqué la mort de sa mère laquelle est morte de chagrin. Même son chien (l’un des premiers toutous de la littérature) meurt.
Ulysse, c’est un homme qui souffre jusqu’au dernier moment, y compris - dans ce livre - méditant sous son olivier. J’ai lu, je ne sais plus trop où, que ce serait même lui qui aurait tué le fils d’Andromaque, Astyanax, en le jetant du haut des murailles de Troie… Il a donc vraiment de quoi méditer pendant sa vieillesse.

Évidemment, je n’oublie pas qu’on ne peut pas non plus proposer un livre de cinq cents pages à un élève de sixième.

Je me demande tout de même s’il n’est pas préférable de lire l’édition de L’école des loisirs, la fameuse traduction de Leconte de Lisle, abrégée et remaniée à partir du texte grec par Bruno Rémy. Ce n’est pas nouveau, certes, mais c’est très bien.

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